Toutes les actualités

« Une course au large est un défi au plan physique »

  • Partager
  • Imprimer

Navigateur français (ingénieur de formation) né en 1981, Ian Lipinski est notamment double vainqueur des éditions 2015 et 2017 de la Mini Transat, vainqueur de la Transat Jacques-Vabre 2019 et du Défi Atlantique en 2023. Il évoque la gestion du corps indispensable dans sa discipline, la course au large.

Quelle est votre actualité sportive ?

La course au large est un sport mécanique, avec des bateaux qui passent beaucoup de temps en chantier. Le Class 40 Crédit Mutuel sur lequel je cours depuis cinq ans est dans son chantier d’hiver, où il bénéficie de réparations et d’optimisations. Parallèlement, j’ai un nouveau bateau qui est en fin de construction.

Ma première course de l’année sera The Transat CIC Lorient – New York, départ le 28 avril avec le Class 40. C’est une course difficile car elle est en solitaire et elle emprunte une route directe très au nord dans l’Atlantique, à l’encontre du chemin des dépressions, contre le vent, contre les vagues et le courant. Cela va « taper fort ». Comme on dit dans la marine, pour le bateau ce sera comme deux fois la distance, trois fois le temps et quatre fois la peine. Cette course devrait durer moins de deux semaines.

Avez-vous déjà eu recours à la kinésithérapie dans votre parcours ?

Oui, essentiellement pour me rétablir de blessures. J’ai eu des entorses de la cheville, une sciatique du bras (névralgie cervico-brachiale), des luxations des doigts.

Pour soigner la sciatique, mon kinésithérapeute a pratiqué la méthode McKenzie*, je m’en souviens très bien.

Comment vous préparez-vous physiquement à une course au large ?

Cette activité étant très physique, je fais toute l’année du renforcement musculaire deux fois par semaine et je pratique d’autres sports : course, vélo, squash. La connaissance du corps est importante pour un skipper, je dois savoir préserver mes muscles et gérer certaines blessures tout seul. Je dois suivre certaines formations médicales, notamment de premiers secours.

En course, il faut fournir des efforts 24 heures sur 24, ne serait-ce que pour se tenir sur le bateau avec le mouvement des vagues. Je suis tout le temps en mouvement. Les manœuvres sont exigeantes : quand on vire de bord, on déplace 200 kilos répartis dans des sacs de 25 kilos d’un bord à l’autre ; quand on change la voile, on la roule dans un effort court et intense, c’est très cardio. Et tout cela peut avoir lieu en pleine nuit, en étant à froid, pas bien éveillé.

Les skippers sont sujets à de nombreuses blessures : côtes cassées avec les chutes, épaules luxées, traumas crâniens, infections avec la fatigue et l’humidité à bord… Il faut partir avec un bon système immunitaire, être en forme, savoir dépenser le moins d’énergie possible dans les efforts. Un défi est aussi de rester lucide, afin de prendre les bonnes informations, les bonnes décisions tout le temps. Le tout avec un déficit de sommeil permanent…

Quelle est votre prise en charge après la course ?

Au retour d’une course, je suis exténué, j’ai mal au dos, aux genoux, aux cervicales, il faut beaucoup de temps pour m’en remettre. J’apprécie alors de pouvoir être aidé par un kinésithérapeute qui connait mon milieu et mon sport !

Les épreuves de voile des JO 2024 se dérouleront entre le 28 juillet et le 8 août, à la Marina de Marseille. Regrettez-vous que la course au large n’ait pas été retenue par le comité international olympique pour cette édition ?

Bien sûr, j’aurais aimé que mon sport devienne olympique, ce ne sera pas le cas. La voile olympique, ce sont des petits bateaux qui font des régates courtes entre deux bouées. C’est tout de même très différent de la course au large et des défis que celle-ci implique !

*Méthode MDT – Mechanical Diagnosis and Therapy