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Accès direct : les avis des kinés

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Le pacte de refondation des urgences, présenté par madame Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé le 9 septembre 2019, prévoit l’accès direct au kinésithérapeute pour les lombalgies aiguës et les entorses de la cheville.
Nous vous avons sollicité pour connaître votre avis, vos commentaires, vos attentes et vos questions concernant cette mesure souhaitée et défendue par l’Ordre depuis plusieurs années et dont les modalités restent à définir.
Vous avez été nombreux à vous exprimer. Voici ce qu’il ressort de vos réponses.

Les kinésithérapeutes en faveur de l’accès direct.

Près de 9/10 des répondants s’inscrivent en faveur de l’accès direct pour les lombalgies aiguës et les entorses de la cheville.
Totalement pour. Une grande avancée pour notre profession.” applaudit Serge O.
Je suis très favorable à ce que les patients aient un accès direct à leur masseur-kinésithérapeute dans le cadre de lombalgie aiguë ou d’entorse de cheville !
Ceci est indispensable pour aider à désencombrer les urgences et les salles d’attente des médecins généralistes qui débordent également notamment en campagne.
” explique Pierre J.
C’est une grande chose pour l’évolution de notre profession et la reconnaissance de notre expertise!!! Enfin!!!” se réjouit Yann M.

Les demandes des kinésithérapeutes.

De nombreux kinés, favorables à l’accès direct, ont émis des demandes afin que cette mesure soit efficace et pertinente.

La formation.

La demande qui est revenue le plus souvent est la nécessité pour les kinés de se former à la prise en charge d’urgence. Quoique certains considèrent qu’ils sont d’ores et déjà aptes à y faire face, beaucoup pensent qu’il est nécessaire de suivre des formations supplémentaires pour ce qui relève de la reconnaissance des “red flags”, ces signes d’alertes qui impliquent de réorienter le patient vers d’autres professionnels de la santé, et de l’application des protocoles diagnostiques.
Il faut absolument prévoir des formations de mise à niveau sur la prise en charge de ces deux « pathologies »” affirme ainsi Nicolas C.
“L’accès direct sera une bonne chose dans la limite où les kinés y sont formés et sont correctement rémunéré pour les responsabilités qui en découlent.
Combien de kinés connaissent les critères d’Ottawa pour la cheville ? Et les critères de triage pour les lombalgies ?”
se demande Alexis O.
“C’est une très bonne chose à condition d’une formation spécifique des kinésithérapeutes sur les diagnostics d’exclusion (drapeaux rouges) et le droit de prescription. La qualification spécifique du kiné dans ces domaines de compétence est donc un prérequis indispensable.” corrobore François D.

La possibilité de demander des actes d’imagerie.

Afin d’assurer l’efficacité de la mesure, les kinésithérapeutes insistent sur le fait de pouvoir demander des actes d’imagerie (radio, scanner, IRM) afin que le patient n’ait pas besoin de consulter son médecin si celles-ci s’avèrent nécessaires. Ils aimeraient aussi recevoir des formations en lecture d’imagerie afin de pouvoir affiner leurs compétences diagnostiques.
L’accès direct chez le kinésithérapeute pour certaines pathologies permettrait de rendre plus cohérent et moins coûteux le parcours de soin de nombreux patients. Les délais de prise en charge étant bien souvent trop longs, la perte de temps est considérable et impacte négativement les chances et la vitesse de guérison. (…). À partir de là, pourquoi ne pas imaginer des kinésithérapeutes agréés à l’accueil de patients en première intention et disposant d’une extension de leurs possibilités de prescriptions dans leur champ de compétences (en particulier concernant l’imagerie)? Pour éviter risques et surcoûts, l’avis médical pourrait prévaloir sur l’avis du kinésithérapeute avec possibilité pour le médecin d’invalider une ordonnance d’imagerie si celle-ci s’avère inutile. Pour le patient, ce serait le gage de bénéficier de prises en charge plus rapides, efficientes et cohérentes. Pour l’assurance maladie, ce serait le gage de réaliser des économies tout en améliorant la prise en charge des patients. Pour le médecin, ce serait le gage de pouvoir davantage s’appuyer sur l’extension des droits/obligations des kinésithérapeutes, tout en conservant ses prérogatives. Pour le kinésithérapeute enfin, ce serait un gage de valorisation et de reconnaissance de sa pratique tout en l’obligeant davantage vis-à-vis de ses patients (respect de la durée des séances, pertinence du BDK, etc.).” explique Alexandre C.

La possibilité de prescrire des antalgiques.

Dans le même ordre d’idée, les kinésithérapeutes demandent également la possibilité de prescrire des antalgiques afin que le patient puisse être soulagé. Ils envisagent aussi des formations spécifiques pour avoir des guidelines de prescriptions de ces antalgiques “Cela nécessite pour les kinésithérapeutes d’avoir un mémo et ou un rappel des antalgiques de classe 1 à prescrire et du protocole à suivre.” explique ainsi Fadela A.

La possibilité de prescrire des arrêts de travail

Dans la suite logique, les kinésithérapeutes expriment leur souhait de pouvoir prescrire des arrêts de travail lorsque la situation l’exige et afin que les patients n’aient pas à repasser par la case médecin lorsque l’arrêt est nécessaire. “Totalement pour ! De nombreux patients nous sollicitent déjà à ce propos. Assumons pleinement ce rôle avec une mise à niveau pour ceux qui sont pour mais se sentent un peu démunis. Au sein d’un protocole incluant la prescription médicamenteuse d’antalgiques et d’arrêt de travail de courte durée.” Résume Paul-Emmanuel T.

Une communication accrue.

Certains demandent à ce qu’un effort soit fait en termes de communication afin de valoriser les compétences du kinésithérapeute, notamment face aux praticiens alternatifs. Comme le dit Christophe P. : “Il faut que l’on revienne dans l’esprit des citoyens non patients que le kiné est un partenaire essentiel et non invasif de sa santé et bien être.

Une valorisation financière de l’acte.

Enfin, certains demandent une valorisation spécifique de ce nouvel acte.

Les questions des kinésithérapeutes.

Outre ces demandes, les kinésithérapeutes favorables à l’accès direct se posent néanmoins des questions sur le dispositif et tout particulièrement sur deux aspects :

  • Le remboursement des patients : nombreux sont les kinésithérapeutes à juger le remboursement des patients qui les consulteront en accès direct nécessaire afin de valoriser le dispositif qui doit s’intégrer en cohérence dans le schéma actuel de santé publique..
  • Les obligations et l’encadrement du dispositif : certains se demandent si ce dispositif ne sera pas réservé aux kinés exerçant en MSP ou en CPTS  et ce que cela va changer en termes de parcours de soin. Ils se posent également des questions sur le cadre légal, sur l’obligation d’accueillir des patients en urgence, d’assurer des gardes ainsi que sur les assurances (permanence des soins).

 

Les réserves des kinésithérapeutes.

Une faible proportion des kinésithérapeutes ayant répondu à notre enquête s’est déclarée contre l’accès direct et ce pour trois raisons majeures :

  • Le manque de formation : certains (des kiné-ostéopathes qui pratiquent déjà l’accès direct par la force des choses) estiment que les kinés ne sont pas assez formés aux urgences.
  • Des cabinets d’ores et déjà saturés.L’accès direct n’a d’intérêt si vous pouvez recevoir le patient rapidement. Avec 1 à 2 semaines d’attente en permanence c’est compliqué. Les patients vont prendre les cabinets pour les urgences et nous allons supporter leur mécontentement d’autant plus.” explique Arnaud G.
  • Un dispositif qui ne remplace pas l’éducation des patients : Je pense que l’accès direct des patients aux kinésithérapeutes dans les cas d’entorses et de lombalgies chroniques est une fausse bonne idée. A mon sens, ce n’est pas ce qui va désengorger les urgences. Pour cela, je pense que la meilleure solution est l’éducation des patients, de la population (ce qui nous incombe aussi) que ce soit en matière de soins ou financièrement.” explique Marie L.